ou la Traviata sauce vache folle

Une commande express

A la mi-octobre, en pleine reprise de L’enfant et les Sortilèges à l’Opéra de Lausanne, Brigitte Romanens qui dirige le théâtre Le Reflet de Vevey m’a fait la proposition gourmande de participer au menu l’alléchant du Midi Théâtre. Voici donc une mise en bouche pour présenter brièvement ce projet. Le titre provisoire d’abord reflète l’esprit dans lequel je compte m’engager : un spectacle musical parlant de cuisine et s’amusant de l’esprit de l’opéra bouffe. Il est à noter que « opera buffo » en italien a trait plus à la bouffonnerie qu’à la nourriture.

La cuisine, muse inépuisable d’inspiration

« Dis moi ce que tu manges et je te dirais qui tu es ! ». La cuisine est comme le théâtre, le lieu par excellence du partage et de culture, tellement l’imagination et la gourmandise humaine sont sans de limites. Les vins, les produits, les plats, ont dans chaque pays des histoires et des anecdotes savoureuses. La cuisine a toujours est depuis longtemps au centre de mes préoccupations artistiques. Les titres de certains de mes spectacles parlent pour eux-mêmes : Un Plat de Résistance, Sautecroche aux petits oignons ou Boulettes

Le refus de l’uniformisation du goût, de tous les goûts dans la création n’est pas un combat si anecdotique. La « malbouffe » n’est pas seulement une tragédie calorique menée par des restaurateurs industriels mondialistes et cupides. C’est aussi un appauvrissement de notre culture qui mène a une perte d’identité et de sentiment d’appartenance à une communauté. Oui aux saveurs du monde ! Non aux rognures de l’uniformisation ! Aussi, créer et cuisiner c’est résister au temps et s’arrêter un moment pour déguster le monde.

Un vaudeville-opéra al dente

M’inspirant de la trame de l’opéra « La Traviata », voici un vaudeville chanté où il est question d’amour, de bouches, OGM, de cuisine moléculaire et de coups de fourchette du destin. Violetta, muse de la cuisine bio moléculaire, cache sa terrible maladie de Kreuztfeld Jacob qui transforme son cerveau en gélatine. Mais voici que vient dans son restaurant son plus grand admirateur, Alfredo, héritier de la multinationale Lèselé qui vent des capsules à café. Le coup de foudre est immédiat. Mais Germont Lèselé, le père d’Alfredo, ne peut permettre cette union contre nature entre la nourriture bio et les poisons industriels… Une opérette amuse bouche, ode aux baisers à renverser les palais, adaptable et jouable dans toutes les cuisines et salles de restauration !

Modes de cuisson

La forme de ce spectacle de 50 minutes sera donc celle d’un vaudeville chanté et opératique. Ce travail sera une continuation de ma collaboration ludique et légère avec Lee Maddeford sur Love on the (Mega) byte et La Fesse Cachée de la Lune.

Sous les rires, la gaité, et la bonne chère perceront les thématiques de la nourriture industrielle, des OGM et de notre dramatique auto empoisonnement physique et psychique. Le besoin de performance qui a gagné jusqu’à notre alimentation n’est il pas en train de nous déstructurer de l’intérieur ?

Ce spectacle sera joué à midi dans des halls de théâtre extrêmement divers. Ne pouvant jouer avec la lumière, le cadre sera donc basé essentiellement sur les accessoires et les costumes et devra s’adapter et être tout terrain. En accord avec la thématique, ce spectacle sera élaboré en collaboration avec les cuisiniers pour offrir comme dans le livret, des Pommes de terre en trois façons et proposer à chaque lieu des produits locaux pour surprendre autant par le théâtre que par le goût !

Lee Maddeford, chef musical

« Pour Bouffons de l’opéra, je veux continuer ma collaboration avec Benjamin Knobil avec qui je travaille depuis 2013. Nous venons de terminer ensemble Love on the (mega) Byte, opérette numérique. Je lui ai commandé ce livret et l’alchimie a bien fonctionné.

Benjamin Knobil m’a commandé pour ce midi théâtre, je le cite: « Un menu musical/moléculaire complet. Une musique apéritive qui commence au vin blanc, joue avec ludisme des complexités subtiles d’un bourgogne pour se terminer au dessert par des accents corsés de café adoucis d’une palette de sons délicieux à la douceur du chocolat. »

L’idée thématique de la cuisine moléculaire permet de s’amuser musicalement et de se moquer de la déstructuration alimentaire par des sons et mélodies parodiques et absurdes. C’est pourquoi je veux explorer une piste ou je vais peu souvent. Je veux expérimenter une déstructuration musicale mélodique et harmonique. Je veux jouer et m’amuser avec les formes, composer des airs et les briser en molécules, pour après les défaire et les remettre ensemble dans un ordre différent. Partant de mélodies tonales, cette déstructuration musicale parfois aléatoire obligera à une écoute exigeante, différente et surprenante.

Je composerai pour deux chanteurs confirmés et un comédien chanteur, capables de chanter des variations ludiques mais aussi complexes et déroutantes. Aussi, pour cette opérette itinérante, il me semble le plus simple de jouer et d’accompagner les chanteurs au piano avec une structure légère de sonorisation pour mon instrument et pour des micros HF pour les interprètes.

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